lundi 27 avril 2009

Obama, cent jours après

















Il serait quasi impossible de dresser en quelques lignes le bilan des cent premiers jours de Barack Obama à la présidence des États-Unis d'Amérique. Sans aucun doute, une nouvelle ère a débuté avec son arrivée à la Maison-Blanche. En pleine crise, la confiance des Américains lui est encore largement acquise, tandis que la sympathie qu'il suscite en dehors de son pays ne cesse de croître. Dans Le Monde, Sylvain Cypel a raison de le souligner, l'administration démocrate va vite, "même si, sur nombre de sujets, sa détermination n'a d'égale que sa prudence".

Je voudrais, pour ma part, étant donné l'actualité française du mouvement de lutte contre les réformes portant sur le statut des enseignants-chercheurs, citer le discours que vient de faire le président américain devant l'Académie des sciences dans la capitale fédérale.

Il s'y est plaint du niveau, en mathématiques et en sciences, des jeunes élèves américains âgés de 15 ans, dont la moyenne dans ces matières les classe dans le monde aux 25ème et 21ème rangs. Loin de lui l'idée que le niveau baisserait, que tout était mieux avant, une antienne bien connue dans notre pays. Non, Barack Obama est venu pour dire que cette situation était due au sous-financement de la science et la recherche, et concernait l'ensemble de la nation américaine. Il a alors annoncé qu'il allait leur consacrer 3% du produit intérieur brut, plaçant ainsi les enseignants et les chercheurs au cœur de l'espace social et à l'avant-garde de la sortie de crise.

Ce discours ne concernait pas les humanités, qui feront sûrement l'objet d'une autre intervention présidentielle, et pourtant il en était pétri. Nous avons déjà souligné combien la conscience historique de Barack Obama est remarquable. Ici, à Washington DC, il a rappelé que l'Académie des sciences a été fondée par Abraham Lincoln en pleine guerre civile, quelques mois après la lourde défaite de Fredericksburg : "Il refusait d'accepter que le seul but de notre nation soit d'assurer sa survie. Il créa l'Académie, finança les Land-Grant Colleges et commença le chantier du transcontinental". Un pont idéalisé entre savoir et marché? Non, car Obama cite Lincoln lui-même qui considérait qu'il faut ajouter le combustible de l'intérêt au feu du génie de la découverte... de choses nouvelles et utiles."

L'appel à l'imagination des jeunes diplômés américains est également présent. Il s'accompagne d'une réelle volonté d'en faire des "producteurs" et pas seulement des "consommateurs", d'y impliquer davantage de femmes et de personnes issues des minorités. Bref, de libérer les énergies et non d'être malthusien, une tâche également urgente dans la France de ce début de 21ème siècle, où les enseignants devraient pouvoir s'épanouir dans le "mystère des grandes assemblées" :

"Il semble qu'un seul parle ici, disait Michelet dans sa leçon du 29 décembre 1842 au Collège de France ; erreur, vous parlez aussi. J'agis et vous réagissez, j'enseigne et vous m'enseignez. Vos objections, vos approbations me sont très sensibles. Comment ? On ne peut le dire. C'est le mystère des grandes assemblées, l'échange rapide, l'action, la réaction de l'esprit. L'enseignement n'est pas, comme on le croit, un discours académique, une exhibition ; c'est la communication mutuelle, doublement féconde, d'un homme et d'une assemblée qui cherchent ensemble".